Au sanctuaire des dolmens,
Levo 6 Deuxième cyclum 430
Argan,
Tout nous sépare désormais... Bien que l'immortalité me permet bien des prodiges, me rend invulnérable au temps et aux souffrances physique... Mon âme saigne, meurt, crie de douleur ! Ô Argan, comme vous me faites souffrir ! Et bien que "souffrir" soit le plus légitime des mots pour cette situation, il est bien fade comparé à mes ressentis. La fleur gouvernant ma chair et mes os, se fane et pourri en moi. Je ne suis plus que le reflet d'un désir non assouvi, errant pour la quête de son maître, n'ayant le temps de faire le deuil de l'être aimé. Vous êtes pourtant les deux à la fois. Me remémorant votre déclaration, notre ultime baiser... Et en remontant même plus loin le jour de notre rencontre, cette déchirure me fait bouillir de haine envers la vie. Je n'étais alors qu'une fille s'occupant du plaisir des hommes, une souillon. Je me cachais d'une cape épaisse, honteuse de ma vie, et encore plus de cet avenir que j'anticipais trop tôt. Trop tôt, oui... Car vous êtes arrivé. Dans cette calèche parée d'or et de gravures, et vous d'un costume vous rendant encore plus beau qu'une entité... L'éblouissement que vous me donniez , dès lors, dépassa tout le reste. Je vous ai offert ma piteuse vie, pour vous protéger, vous suivre où que vous alliez. Bien que j'agissais dans l'ombre, que je ne savais me battre qu'avec un vulgaire couteau, je vous ai sauvé un jour d'une embuscade. Vous rappeliez-vous ces pourritures jonchant le sol ? La fierté me fit oublier le reste, je me sentais apte à déplacer les montagnes, et ce, rien que pour votre personne. Alors vous m'avez prit sous votre aile, confié à de nombreux maîtres d'armes ainsi qu'à un sage permettant de contrôler mon corps et mon esprit. Une machine de guerre au coeur tendre. Oui, car lorsque vous me rendiez de rares visites, ce coeur palpitait de joie. "Continuez ainsi, Nyro. J'ai foi en vous." Cette phrase que vous me répétiez souvent... J'aimerais que vous soyez là pour la redire, me donner cette force, cet amour trop tardif... Revenez... Je vous en prie.
Je n'ai plus à exprimer de la pudeur envers vous, maintenant, vous êtes mort. Mort ! Mes mots ne peuvent vous toucher, cette plume est lasse d'écrire comme mon coeur est lasse d'aimer. Il aime une existence qui a prit fin.
Le répit, jamais je ne connaîtrai. Je coucherai donc, pour l'éternité, les phrases dont j'aurai voulu vous imprégner.
Je vous aime.
Votre serviteur, Nyro